J'ai fini le travail, et je dois rentrer à la maison, à Yopougon. Il me faut faire une escale à Adjamé Renault, là où se trouve ma gare de gbaka. D'habitude c'est vers 18 heures que j'arrive à cet endroit.
Aujourd'hui, j'ai eu tellement d'occupations qu'il est 20 heures moins quand je débarque au carrefour de l'église universelle de la fameuse Renault. Je marche avec beaucoup de prudence en regardant à gauche, à droite. Le calme qui règne à cette heure dans la zone est effrayant. Tout le monde le sait, le périmètre est réputé pour en être un de dangereux. Ma gare de chargement de gbaka est juste à une trentaine de mètres de moi. Je la scrute de ma position. Elle semble complètement déserte. Pas de véhicule dans les parages.
Près de l'église, sur le trottoir, une jeune fille est arrêtée, le regard ailleurs. Que fait-elle par là, seule ? Je n'ai rien à craindre. Je marche d'un pas assuré, et arrive à son niveau. Au moment de la dépasser, à ma grande surprise elle m'interpelle :
- Éhé toi là, viens ici !
Son ton est autoritaire. Je m'immobilise devant sa face, la regarde, le sentiment d'être envahi d'une menace soudaine. Elle porte un ensemble pagne de couleur rose, et svelte, elle n'a bizarrement pas la tronche d'une délinquante.
- Oui ?
L'intonation de mon OUI est interrogative. Elle ne se fait pas prier pour me cracher ce qu'elle attend de moi :
- C'est à moi tu dis OUI d'une manière là, méfie-toi hein ! Sans trop m'énerver sinon je risque de dégamer grave. Tu vas où ?
- Je rentre chez moi, à la maison...
- Ce n'est plus la peine. Tu ne rentres plus. Je me suis calée ici pour attendre un gars, et le hasard a fait que mon choix s'est porté sur toi. Tu comprends un peu dans quoi tu es non, môgô. C'est un kidnapping de confinement Tu vas m'accompagner sans faire d'objection. Dans le cas contraire tu seras mal sôgô. Attention à ne pas te laisser berner par ma forme, parce que je suis mince, pour que tu penses à t'échapper. Je ne suis pas mince, c'est seringue. Ça pique très mal !
Je suis totalement perdu face aux propos de la fille en rose. Quelle est cette sorte d'agression où elle se donne à des verbiages ainsi qu'à des menaces absurdes ? Kidnapping de confinement, qu'est ce que c'est que ça... Néanmoins, je ne veux pas prendre de risques. Je me tiens toujours tranquille devant la jeune fille, et elle m'intime un ordre :
- On y va maintenant !...
Elle lève la main, et aussitôt, deux autres filles vêtues de rose et sorties de nulle part nous rejoignent, chacune une seringue en main. Elles m'encerclent. De part et d'autres de mes bras, il y a une qui me tient par le coude. La troisième, comme le sommet d'une figure isocèle, est devant nous. Nous formons ce triangle. Je les suis tout sagement comme un automate, envahi par la peur. À la moindre erreur, elles n'hésiteraient sans doute pas à faire loger l'aiguille de leurs seringues dans mon ventre. Qui sont ces filles étranges qui m'enlèvent ?...
Dix minutes de marche dans un Adjamé sans âme qui vive, et elles me font entrer dans un couloir obscur. Là, elles frappent à un portail, et quelques secondes après, un jeune garçon nous ouvre la porte.
Nous sommes à l'intérieur d'une résidence. Un grand comptoir adossé à un mur. Le garçon du coin murmure quelques échanges avec l'une de mes agresseuses qui finit par lui dire à haute voix :
- Ça marche, nous la prenons jusqu'au matin...
De quoi est-il question ? Je le découvre enfin lorsque le trio m'entraîne dans une chambre. Un immense lit au milieu de la pièce. Sur l'écran plasma agrafé à une partie du mur, des images de film pour adulte...Bon Dieu !
Elles me demandent de m'asseoir sur le meuble. J'obéis. Le matelas y est soyeux, mais je ressens du feu par derrière moi. L' une des filles sort une petite bouteille de son sac et me la tend.
- Bois ! Vide le contenu !
Est-ce pour m'affaiblir, m'endormir avant de me tuer ? Je n'ai pas le choix de toute façon. Je fais ce qu'elle me demande. Quand je lui redonne le récipient vide, elle me parle à nouveau :
- On n'en a jusqu'au matin. C'est dur de gérer cette période de confinement sans présence masculine. Voilà pourquoi nous t'avons kidnappé. La semaine dernière, l'homme qu'on a entraîné ici n'a pas pu être à la hauteur malgré la décoction qu'on lui a donnée. Est-ce si compliqué de tenir neuf heures non stop ? On l'a transpercé avec nos seringues pour sa nullité. Tout ce qu'on demande, c'est de s'éclater au maximum. Alors tu es prévenu. Sois nous sommes satisFAITES, soit nous faisons ta FÊTE !
Bonsoir chers amis lecteurs, dites à mon épouse que si je ne suis pas rentré aujourd'hui après l'heure du couvre-feu, c'est parce que j'ai été enlevé pour adoucir des ennuis de confinement. Qu'elle prie pour que je puisse satisfaire efficacement trois femmes sinon ce n'est pas sûr qu'elle me reverrait????...
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